Biographie de Maitre Xu Yun 1865 – 1959
Xu Yun (1865-1959) fut le dernier grand maître bouddhiste connu dans la tradition du zen, il était né le 26 avril 1840 (?) dans la province du Fujian, à Chuanzhou fu, et sa vie se déroula avec l’entrée douloureuse de la Chine dans le monde moderne.
Grand héritier du bouddhisme chinois, notamment des écoles Huayen, Tiantai et Chan (Zen), il avait dédié sa vie à la pratique et aux techniques de méditation.
Véritable patrimoine vivant, il fut entre autre le maître du fameux pratiquant de Wushu Haideng et sa vie fut une suite d’ascétismes, de souffrances et de miracles digne d’un saint vivant, sa réputation se propageant jusqu’au au Vietnam, en Thaïlande, en Birmanie et aux Etats-Unis.
Depuis l’âge de 14 ans, il avait été intéressé par la religion bouddhiste et désirait se faire moine, son père voulant le marier lui paya un maître taoïste privé durant trois ans. A l’âge de 17 ans, ses parents le marièrent à deux femmes avec lesquelles il n’eut pas de relations physiques, préférant leur parler de religion.
A l’âge de 19 ans, Xu Yun s’enfuit de chez lui, accompagné d’un cousin, pour un monastère de Fuzhou où il se fit raser la tête et ordonner moine, puis il reçut l’enseignement de maître Miao Lian.
Son cousin partit alors en moine itinérant à travers la Chine, et il ne fut jamais retrouvé, quand à son père, il avait envoyé des hommes pour le rechercher et le ramener à la maison. Xu Yun partit alors se cacher dans une grotte qui surplombait le monastère où il y resta durant trois ans à pratiquer la méditation.
A l’âge de 25 ans, il apprit que son père était mort et que ses deux femmes étaient devenues nonnes dans un monastère. Durant ses trois ans de méditation dans la grotte il avait écrit : » j’étais capable de garder un cœur joyeux, et de laisser mon âme voyager où elle voulait, je ne mangeais que des herbes « .
A l’âge de 31 ans, il alla à Wenzhou où il suivit l’enseignement de maître Yong Qing qui était notamment connu pour son chan (zen).
Sous la gouverne de Yong Qing, Xu Yun ne mangeait que du riz et récitait les poèmes du zen avant qu’il ne parte de 36 à 43 ans sur l’île de Putoshan où il rencontra encore de nombreux autres maîtres.
A l’âge de 43 ans, il était dans la tristesse car il n’avait toujours pas atteint l’illumination. Il entreprit alors un long pèlerinage à travers la Chine à pied, jusqu’aux cinq montagnes dans le Shanxi, le Wutaishan. Il faillit mourir deux fois, une fois de froid et l’autre de maladie. Tombé dans une tempête de neige et atteint de fièvre, il fut secouru par un mystérieux mendiant qui lui donna des médicaments et lui sauva ainsi la vie.
Entre 54 et 55 ans, il se retira dans une montagne pour lire le tripitaka, puis à l’âge de 56 ans, il fut invité au monastère de Gaoming, et sur sa route, il glissa et tomba dans une rivière avant d’être récupéré par un pêcheur,
Il tomba gravement malade, et arrivé au monastère chan (zen) de Gaoming, il ne put enseigner la méditation aux moines locaux. Ce refus avait été pris comme un affront envers toute la communauté et il fut puni à coups de bâtons, ceci aggravant encore plus sa maladie.
Il accepta sans broncher cette sanction, puis pensant qu’il était sur le point de mourir, il se mit en posture de méditation et resta ainsi immobile, méditant sans relâche. C’est alors que, lorsqu’un moine lui apportant une tasse de thé brûlante la renversa sur sa main, il atteignit l’illumination.
Il se consacra désormais à la restauration du bouddhisme en Chine. Ne recevant plus d’aide de l’État, les moines bouddhistes, s’ils n’avaient pas été tués lors des affrontements avec les soldats rouges, devaient travailler dans les champs ou dans les usines pour pouvoir survivre.
En mars 1951, alors que Xu Yun était âgé de 112 ans, le temple du Yu men où il résidait fut soudainement entouré d’une centaine de gardes rouges, puis interdit d’entrée et de sortie à quiconque, les bonzes mirent le vénérable dans ses quartiers. Les moines furent emprisonnés dans la salle du dharma et dans la salle de méditation.
Après cela, les officiels communistes cherchèrent toute effigie des anciens maîtres, toute statue ou toute richesses qui pouvaient se trouver dans le monastère, du toit au plancher; mais ils ne trouvèrent rien du tout.
Ils arrêtèrent alors le principal du temple, un dénommé Ming Gong, et les autres officiels du monastère, Wei Xin, Wu Hui, Chen Gong et Wei Chang qui furent tous pris, et l’ensemble des manuscrits et documents de plusieurs centaines d’années furent emporté dans des sacs de toiles.
Au fil des jours, 26 moines du monastère furent interrogés, puis torturés par les gardes rouges, afin qu’ils leurs révèlent où se cachaient les richesses du monastère.
Ils clamèrent leur ignorance, et Miao Yun, le disciple le plus prometteur de Xu Yun fut battu à mort. Wu Yun et Ti Chi furent si violemment frappés que leurs os en furent brisés, et quand ils ne purent rien découvrir, ils s’emparèrent du maître Xu Yun, le 6 avril 1951.
Les communistes enfermèrent le maître dans une chambre calfeutrée aux volets fermés, ils interdirent au vénérable de boire et de manger et il n’était pas autorisé à aller aux toilettes.
Il y avait juste une petite lampe qui éclairait jour et nuit dans le noir de la chambre, puis le 8 avril, ils voulurent forcer le maître à révéler où se trouvaient d’imaginaires fusils et l’or, et ils commencèrent à le frapper avec des bâtons de bois d’abord, puis ne voyant pas d’effet significatif, ils continuèrent avec des matraques de métal. Ils le frappèrent jusqu’à ce que sa tête et son visage soient complètement recouverts de sang, et que ces doigts furent cassés.
Ils l’interrogèrent en même temps qu’ils le frappèrent, et le maître se mit dans la position du lotus, en rentrant ainsi en méditation. Bien que les coups fondaient sur lui, il ferma les yeux et la bouche et il resta silencieux dans un état de profond samadhi.
Finalement ses assaillants, croyant qu’il était mort, le laissèrent à terre. Quelques jours plus tard, apprenant que le maître n’était pas mort, les gardes rouges vinrent encore dans la chambre ; Ils virent le maître encore assis en méditation et entrant dans une colère furieuse, ils le frappèrent à coups de massues en bois, puis ils le rouèrent de coups de pieds à l’aide de leurs bottes en cuir. Le sang coulait de partout sur son corps et les gardes rouges cette fois-ci le croyant bel et bien mort, sortirent de la chambre.
Les disciples du maître aidèrent Xu Yun à se rasseoir en le prenant dans leurs bras, et vers le 15 avril, Xu Yun adopta la position couchée du bouddha entrant en parinirvana.
Ses disciples auraient pu le croire mort, si son corps n’était pas encore chaud. Les bonzes le gardèrent encore, et Xu Yun ouvrit enfin la bouche en leur expliquant que son âme était parti dans le paradis toutsita, où il rencontra le futur Bouddha Maitreya, qui lui dit que ce n’était pas encore le temps pour lui de mourir et qu’il devait rester au monastère.
Les disciples commencèrent à prendre peur en voyant la puissance du maître, et les gardes communistes intrigués questionnèrent.
» Le vieux ne peut-il pas mourir ? »
Et le moine qui était à son chevet répondit.
« Le maître a accepté de souffrir pour aider les choses vivantes. Pour vous, les hommes, il vous prédit des désastres naturels. Il ne peut pas être mis à mort, un jour, vous comprendrez ces choses par vous-mêmes. »
Les communistes furent effrayés et ne dérangèrent plus Xu Yun qui allait survivre, mais sa condition physique fut gravement altérée. Il s’éteignit en 1959 à l’âge de 95 ans.